Nous sommes nombreux, dans notre parcours professionnel, à avoir passé par la case « assessment » lors d’un processus de recrutement ou de promotion interne. Certains en gardent d’ailleurs un souvenir ému, comme Lionel[1], un client qui nous racontait : « nous étions analysés, filmés, scrutés durant 2 jours, chaque détail de notre vie était ensuite utilisé pour ou contre nous, un enfer ».
Ce sont les Américains, dans les années 50, qui ont adapté les méthodes d’évaluation de potentiel issue du domaine militaire au monde de l’entreprise, et plus spécifiquement pour les postes à responsabilité managériale. L’entreprise AT&T est la première à avoir créé un Assessment Center et à avoir démontré l’efficacité prédictive des méthodes d’assessment[2]. Depuis les années 80, les assessments ont été largement importés en Europe et se sont démocratisés. D’abord réservés aux cadres supérieurs et très onéreux, ceux-ci ont peu à peu évolué jusqu’à aujourd’hui. Et nous pensons qu’il est temps de les faire évoluer encore davantage. En effet, aujourd’hui nous trouvons majoritairement deux types d’assessments sur le marché.
Qu’est-ce qui définit un assessment ? L’assessment est une évaluation observante des savoirs, savoir-faire et savoir-être d’une personne en fonction d’un poste ouvert dans une entreprise. L’évaluation doit prendre en compte les spécificités de la personne mais aussi celles de l’environnement du poste. Il s’agit d’évaluer l’adéquation "profil <-> poste" mais aussi "valeurs du candidat <-> valeurs de l’entreprise" et "motivation du candidat <-> leviers motivationnels de l’entreprise". Et surtout, l’assessment doit évaluer l’adéquation dans les deux sens. L’entreprise a-t-elle raison de choisir ce candidat et le candidat a-t-il raison de choisir cette entreprise ? Quelles compétences évaluer ? Pendant longtemps, les assessments ont évalué une batterie de compétences types. « Les 18 capacités du manager », par exemple, ou « les 15 atouts du bon vendeur ». Aujourd’hui nous savons que les compétences nécessaires pour occuper un poste dépendent beaucoup du contexte du poste. Il est donc important, pour chaque assessment, de déterminer quelles sont les compétences nécessaires et de se concentrer sur celles qui feront la différence sur le terrain. Exemple Un directeur administratif doit bien sûr avoir des compétences d’analyse, de synthèse, de reporting et autres exigées par son métier. Mais pour bien prendre son poste, pour s’adapter à la culture d’entreprise, pour développer son plein potentiel, il a peut-être surtout besoin d’une grande capacité d’écoute, de résister au stress ou de s’affirmer. Pourquoi ? Car le poste proposé l’est dans une Fondation en crise, ou une PME en difficultés. Et il devra avoir une capacité de concentration malgré les dérangements. Pourquoi ? Car l’entreprise va déménager dans 12 mois et les locaux subissent des travaux. Et il devra être à l’aise avec les outils digitaux. Pourquoi ? Car une partie de son équipe travaille à distance et a l’habitude d’utiliser les derniers outils du digital 4.0. Comment déterminer les compétences à évaluer ? Il faut évaluer les compétences qui, sur le terrain, feront la différence. Or, qui de mieux placé que l’équipe directe pour déterminer ces compétences ? La future équipe, les RH, les potentiels supérieurs, pairs ou adjoints doivent travailler ensemble pour définir, sinon valider, les compétences clés. Demandez-leur quelles caractéristiques devra avoir leur nouveau collègue ? Qu’est-ce qui est le plus important ? En faisant cet exercice vous atteignez trois objectifs :
Cet exercice peut se faire pour tout type de poste, pas seulement pour les postes à responsabilité managériale. Un assessment peut être réalisé, par exemple, pour un poste d’assistant administratif afin de valider la compétence de gestion du stress et la capacité de dire non et de fixer des limites à autrui, si ce sont là les deux éléments cruciaux dans l’environnement de travail. Anecdote Nous accompagnons certains EMS dans la mise en place de méthodes d’accompagnement, notamment la méthode Montessori, qui a pour objectif de restituer l’autonomie au résident. L’une des dimensions de cette méthode d’accompagnement consiste à demander au résident ce qui est important pour lui chez un infirmier. Quelle est la compétence essentielle à développer pour être un bon infirmier? La réponse la plus fréquente ? Les mains chaudes! Il s’agit là d’une compétence, ou plutôt d’une caractéristique, qui n’apparaît jamais sur les descriptifs de poste des infirmiers. Et pourtant... Preuve, s’il en est, qu’il s’agit de déterminer les caractéristiques clés d’un candidat avec les gens du terrain. Comment sont évaluées les compétences ? Chaque compétence est évaluée en fonction d’indicateurs clairement définis et observables. C’est ce qui donne une crédibilité et une réelle efficacité prédictive à l’assessment. Par exemple : la compétence « écoute » peut être définie par les indicateurs :
Conclusion L’assessment, aujourd’hui, est un outil sur-mesure, souple et adaptable qui peut intervenir dans différents processus de recrutement, pour tout type de poste. Il peut durer quelques heures ou une journée complète selon les besoins, et être considéré comme une partie intégrante du processus d’onboarding des collaborateurs. Il permet également de donner des pistes pour accompagner l’intégration du candidat : devrait-il suivre une formation ? Y’a-t-il des projets spécifiques à lui confier ? Son responsable hiérarchique doit-il adapter son style de management à sa personnalité ? A-t-il besoin d’autonomie ou de suivi et de contrôle ? ... Nous pensons que l’assessment ne doit ni ressembler à un recrutement de l’armée ni à un simple test passé en ligne, mais qu’il doit s’agir d’un processus qui implique l’équipe, le management et le candidat et qui prépare leur rencontre le mieux possible. Pour finir sur une comparaison un peu triviale, nous pourrions dire qu’un assessment center fonctionne quelque peu comme une agence matrimoniale. En fait, l’évaluateur est un expert en mariages, il doit pouvoir vous dire si le partenaire choisi est le bon. Sauf que, dans ce cas-là, ce n’est pas forcément censé durer toute la vie. [1] Prénom d’emprunt [2] Zaal, J. N. (1998). The assessment centre methods. In P. J. D. Drenth, C. J. Wolff, & H. Thierry (Eds), Handbook of Work and Organizational Psychology People. Personnel Psychology (2nd ed., pp. 89-121). East Sussex (UK): Psychology Press. Références :
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